Les peuples forgent souvent leur spécificité sur les langues parlées sur leur territoire. Il ne s’agit toutefois pas du seul élément constitutif de leur identité. Ainsi, l’Europe compte une centaine de langues et variétés linguistiques encore pratiquées de nos jours. Pourtant l’Union européenne n’en reconnaît que vingt-trois tandis que les États la constituant ne se concentrent souvent que sur une seule langue octroyant à la marge quelques droits aux autres langues. En effet, la discrimination linguistique est un des faits majeurs des dernières années.
Les Européens parlent des langues de toute origine, les groupes les plus représentés étant germaniques, romans et slaves. Il s’agit de langues indo-européennes, c’est-à-dire présentant des caractéristiques communes en termes linguistiques (origine du vocabulaire, syntaxe, traits grammaticaux..), quoique parfois difficilement décelables. Les autres groupes de langues indo-europénnes comprennent les langues celtiques ou baltiques. Il existe d’autres groupes présents en Europe, notamment les langues finno-ougriennes (hongrois et finnois étant les deux plus pratiquées du groupe). De même, quelques langues isolées sont aussi présentes sur le continent. Ainsi, les langues turco-altaïques sont pratiquées dans quelques régions de l’est européen. Enfin le basque, dont l’origine est discutée, permet de clore ce tableau simplifié de la diversité linguistique européenne.
Les États-Nations s’étant souvent constitués par l’imposition d’une seule langue au détriment des autres parlées sur des territoires souvent conquis, le moyen utilisé pour intégrer les populations a été l’assimilation linguistique. Tous les États à quelques exceptions près ont réagi de la sorte : l’Allemagne, les Pays-Bas, la France, l’Espagne, l’Italie..
Aujourd’hui pourtant, le multiculturalisme et la tolérance étant devenus des normes internationales, de nombreux états reconnaissent l’ensemble des langues autochtones. Poussés par les populations locales et les institutions supra-nationales comme le Conseil de l’Europe, ils n’ont d’autres choix que de permettre à leurs concitoyens d’utiliser leurs langues en toute liberté, et mieux, de les reconnaître officiellement afin de permettre leur diffusion et ainsi leur survie. Cette nouvelle donne européenne a abouti dans la plupart des États à l’émergence d’une législation spécifique sur les langues régionales.
Par exemple, la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires permet une meilleure prise en compte des langues. Elle définit une langue régionale comme étant traditionnellement parlée dans une région sans en être la langue de l’ensemble des citoyens de l’État, mais étant pratiquée par un groupe numériquement inférieur au reste de la population de ce même État. En revanche cette langue peut être majoritaire dans ladite région.
Le terme « langue minoritaire» est souvent utilisé dans le sens de « langue régionale », une distinction entre les deux étant souvent difficile à faire. En effet, le premier terme est souvent perçu de manière péjorative et ne correspond pas toujours à la réalité sur le terrain. Le second suppose que la langue est territorialisée et se parle dans une région définie. Ainsi, l’expression « langue moins répandue » leur est souvent substituée. Les langues moins répandues sont moins pratiquées que d’autres langues du territoire tout en en étant issues. De fait, le catalan, n’est pas une langue minoritaire en Catalogne, car il est parlé par la quasi totalité de la population. De plus il s’agit d’une langue parlée par près de dix millions de personnes. En revanche à l’échelle d’un État ce terme peut représenter une certaine réalité. Certaines langues régionales peuvent également être pratiquées dans deux États différents, comme le basque qui est reconnu dans les deux communautés autonomes d’Euskadi et de Navarre à des niveaux différents et ne dispose d’aucun statut officiel en Iparalde, c’est à dire le Pays basque nord, dépendant de l’État français.
Les langues transfrontalières entrent également dans le champ des langues moins répandues. Elles peuvent être officielles dans un État et considérées comme langues minoritaires dans un autre. C’est le cas de l’allemand, du hongrois, du danois, par exemple. L’allemand est officiel en Allemagne mais minoritaire en Belgique, le Hongrois est officiel en Hongrie mais minoritaire en Roumanie et le danois est pour sa part minoritaire en Allemagne.
Enfin, le troisième cas de langues minoritaires en Europe concerne les langues qui ne sont parlées sur aucun territoire particulier, comme le rom ou le yiddish. Il s’agit de langues dispersées ou nomades.
La liste des langues régionales est assez longue. On estime que cinquante millions de citoyens européens parlent une langue moins répandue, sur les 450 millions que compte l’UE. Ce tableau ne serait pas complet si on n’évoquait pas le moyen de faire vivre une langue, sinon de lui permettre de survivre, dans un environnement souvent hostile, sinon monolingue. Les langues régionales doivent souvent côtoyer d’autres langues, officielles au niveau étatique. Cela crée une situation de bilinguisme ou diglossie. Le bilinguisme a tendance à favoriser une langue par rapport à l’autre. Certaines langues deviennent la langue de communication extérieure, tandis que d’autres se pratiquent dans des cercles plus restreints, à la maison par exemple. Cette situation participe souvent à l’extinction de la langue pratiquée en privé. Ainsi le bilinguisme intégral est souvent difficile à imposer, mais vital pour que chaque langue vive à égalité. Le seul moyen d’y parvenir est d’enseigner les langues pratiquées sur le territoire, la langue minorisée étant à privilégier dans les premières années d’apprentissage (la solution de l’enseignement par immersion étant dans ces conditions préconisée). Mais l’enseignement n’est pas la seule mesure à instaurer pour faire vivre une langue. Sa diffusion dans les médias (télévisions, radios, journaux) et son utilisation dans la vie sociale (justice, administration) sont par conséquent essentielles. Cela implique une politique linguistique ambitieuse et volontariste.
Langues régionales
Liste des langues régionales selon le Bureau européen pour les langues moins répandues
Aragonais | Aragonés |
Arménien | Hayerēn |
Aroumain | Armâneti |
Asturien | Asturianu |
Bas Allemand | Nedderdüütsch |
Basque | Euskera |
Breton | Brezhoneg |
Catalan | Català |
Cornique | Kernewek |
Corse | Corsu |
Féroïen | Føroyskt |
Francoprovençal | Arpitan |
Frioulan | Furlan |
Frison | Frysk |
Gaélique écossais | Gàidhlig |
Galicien | Galego |
Gallois | Cymraeg |
Irlandais | Gaeilge |
Karaïm | Karaïm |
Ladin | Ladin |
Langues d’Oïl | Oïl |
Limbourgeois | Limburgs |
Live | Līvõ kēļ |
Luxembourgeois | Lëtzebuergesch |
Mannois | Manx |
Meänkieli | Meänkieli |
Mirandais | Mirandés |
Mócheno – Bernstoler | Mócheno |
Occitan | Occitan |
Pomak | Помаци |
Romani | Rromani ćhib |
Ruthène | Русинська / Rusyns’ka |
Same | Samegiella |
Sarde | Sardu |
Saterlandais | Seeltersk |
Seto | Seto |
Scots | Scots |
Sorabe | Serbsina |
Tatar | Tatarlar / Татарлар |
Võro | Võro |
Wallon | Walon |
Yiddish | ייִדיש / Yiddish |
En italique, les idiomes dont le statut de langue est discuté